Le coût du Brexit pour le Royaume-Uni

Le coût du Brexit pour le Royaume-Uni

Depuis le 1er janvier 2021, le Royaume-Uni n’est plus membre de l’Union européenne (UE). Les partisans du Brexit estimaient que cette décision permettrait de restaurer l’indépendance du Royaume, de réaliser des économies budgétaires, de maîtriser l’immigration et de stimuler une croissance économique plus forte. Trois ans et demi plus tard, les Travaillistes arrivant au pouvoir, quels premiers enseignements tirer de la sortie de la Grande Bretagne de l’Union.

Le Brexit n’a pas accru les marges de manœuvre monétaires du Royaume-Uni en matière de fixation des taux d’intérêt et du taux de change, puisque le pays ne faisait pas partie de la zone euro. La démission de la Première ministre Liz Truss, dès octobre 2022, après la présentation d’un budget déséquilibré, en est une preuve. Les marchés ont sanctionné le Royaume-Uni d’autant plus sévèrement que ce dernier ne peut plus compter sur la solidarité européenne.

Après la pandémie de COVID-19 et la guerre en Ukraine, la Banque d’Angleterre a dû augmenter ses taux directeurs plus vigoureusement que la Banque centrale européenne en raison d’une inflation plus élevée outre-Manche que dans la zone euro. Cette inflation est à la fois due à la hausse des prix de l’énergie et des matières premières, et à celle des produits en provenance de l’Union européenne, désormais soumis à des droits de douane. La dépréciation de la livre sterling a également pénalisé l’économie britannique en renchérissant les importations.

Les exportations ont diminué, les importations ont augmenté. Le taux de couverture de 66 %, contre 90 % pour la France.

Contrairement aux attentes des partisans du Brexit, le Royaume-Uni n’a pas vu ses exportations augmenter. Selon Datastream, entre 2020 et 2022, elles ont diminué tandis que les importations augmentaient. Le déficit commercial britannique a dépassé les 8 %, contre 5 % en 2015. Le taux de couverture entre exportations et importations est de 66 %, contre 90 % pour la France, elle-même confrontée à un déficit structurel de sa balance commerciale.

Les investissements des entreprises ont diminué depuis le Brexit, passant de 11 % à 9,8 % du PIB entre 2016 et 2023. La baisse est particulièrement marquée pour les investissements étrangers, qui sont passés de 7 à 4 % du PIB sur la même période. Les entreprises étrangères se détournent du Royaume-Uni, qui n’est plus une porte d’entrée vers l’Union européenne et dont les produits sont soumis à des droits de douane à leur entrée dans ce marché.

Les ménages britanniques ont accru leur épargne depuis le Brexit, une tendance également observée sur le Vieux Continent. De 2016 à 2023, le taux d’épargne est passé de 8 à 12 % du revenu disponible brut au Royaume-Uni. En revanche, l’investissement des ménages dans l’immobilier n’a pas diminué, contrairement à ce qui a été observé dans la zone euro. Il est resté stable autour de 5 % du PIB.

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Les flux migratoires nets en provenance des pays hors UE sont passés de 200 000 en 2017 à 750 000 en 2023.

En ce qui concerne l’immigration, le Brexit n’a pas entraîné de baisse, mais au contraire une augmentation. L’immigration nette représentait 1,1 % de la population totale en 2023, contre 0,5% en 2016. Les flux migratoires nets en provenance des pays hors UE sont passés de 200 000 en 2017 à 750 000 en 2023, tandis que ceux en provenance de l’UE ont chuté de 300 000 à -100 000.

Des milliers d’emplois hautement qualifiés, notamment dans le secteur financier, ont été supprimés. Alors qu’entre 2010 et 2016, le Royaume-Uni enregistrait une croissance supérieure à celle de la zone euro, la tendance s’est inversée depuis. Le pays a connu une récession en 2023 avant de renouer avec la croissance en 2024. Avec un niveau d’inflation inconnu depuis 30 ans entre 2022 et 2023, la population britannique a subi une baisse sensible de son pouvoir d’achat, ce qui a contribué à la défaite du Parti conservateur aux élections législatives de juillet dernier.

Une des économies les moins performantes au sein de l’OCDE

Moins de quatre ans plus tard, la facture du Brexit apparaît élevée. Il a entraîné une réduction de la croissance du PIB britannique d’environ 5,5 % par rapport à ce qu’elle aurait été si le pays était resté dans l’Union européenne. Selon le FMI, le Royaume-Uni pourrait connaître une croissance faible dans les prochaines années, devenant potentiellement l’une des économies les moins performantes au sein de l’OCDE. Le déficit de croissance a contribué à l’augmentation du déficit public qui dépasse désormais 5 % du PIB, tandis que la dette publique approche les 100 % du PIB.

Les échanges commerciaux du Royaume-Uni ont également souffert du Brexit : les exportations vers l’Union européenne ont baissé de 9 %, et les importations de 18 % par rapport aux niveaux de 2019. La diminution des investissements des entreprises est inquiétante car elle pèsera sur la croissance des prochaines années. Cette dernière sera également handicapée par les pénuries de main-d’œuvre, notamment en ce qui concerne les salariés les plus qualifiés.

Auteur/Autrice

  • Philippe Crevel est un spécialiste des questions macroéconomiques. Fondateur de la société d’études et de stratégies économiques, Lorello Ecodata, il dirige, par ailleurs, le Cercle de l’Epargne qui est un centre d’études et d’information consacré à l’épargne et à la retraite en plus d'être notre spécialiste économie.

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1 Comments

  1. Je ne sais pas qui peut encore acheter au Royaume Uni car les prix de l’immobilier est à se jeter par la fenêtre. L’inflation la plus destructrice est celle des produits alimentaires, l’article aurait du avoir un paragraphe sur ce point. Merci pour metre la lumière sur le Royaume Uni qui semble ne pas être un pays attractif du tout.

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