Comment, dans le passé, les États ont-ils réduit la dette publique ?

Comment, dans le passé, les États ont-ils réduit la dette publique ?

Le niveau d’endettement des États est, en 2022, comparable à celui de la fin de la Seconde Guerre mondiale, les destructions en moins. La dette publique représentait, fin 2021, près de 250 % du PIB au Japon, plus de 150 % en Italie, 130 % du PIB aux États-Unis, 120 % en Espagne, 113 % en France et 70 % en Allemagne. La question de la stabilisation ou même de la réduction des taux d’endettement public se pose et se posera avec encore plus de force dans les prochains mois, car les taux d’intérêt à long terme ne peuvent qu’augmenter avec la résurgence de l’inflation.

Depuis 1970, comment les États ont-ils réussi à maîtriser leurs dettes publiques et à quel prix ?

Les États-Unis ont connu trois périodes de réduction de leur taux d’endettement public (1972-1980, 1993-2000, 2004-2006). Cette diminution a été réalisée à chaque fois avec un excédent budgétaire primaire et une croissance forte. Pour les périodes 1972- 1980 et 2004-2006, les taux d’intérêt étaient inférieurs aux taux de croissance. La réduction du taux de dette publique, la plus forte, a été enregistrée durant les mandats de Bill Clinton, marqués par une croissance importante.

Excédents budgétaires et croissance

À l’exception des années 1970, les taux d’intérêts réels étaient positifs lors des phases de réduction de la dette publique. Le Royaume-Uni, comme les États-Unis, a réussi à trois reprises, lors de ces cinquante dernières années, à réduire le poids de la dette publique (1970-1990, 1994-2001, 2013-2019). Ces diminutions ont été obtenues grâce à des excédents budgétaires sauf entre 2013 et 2019. La croissance n’a joué un rôle que pour la période 1994-2001. De faibles taux d’intérêt n’ont été constatés que pour les périodes 1979-1990 et 2013- 2019.

Le Japon qui détient la dette publique la plus élevée de l’OCDE a connu de brèves périodes où son poids au sein du PIB a légèrement reculé (1973-1974, 1988-1992 et 2003-2008). Ces trois phases de réduction ont été rendues possibles par la croissance. Des excédents budgétaires ont été constatés entre 1988 et 1992, qui est également la période de plus forte baisse. Les faibles taux d’intérêt n’ont joué un rôle que lors de la première période de réduction.

L’Allemagne a connu également trois périodes de diminution de sa dette publique : 1998-2000, 2005-2008 et 2013-2019. Ces trois périodes ont été, à chaque fois, associées à des excédents budgétaires et à une forte la croissance. Les taux d’intérêt bas n’ont eu un effet que pour la période 2013-2019.

Les diminutions sont, en France, de faible ampleur et de courte durée

Depuis 1970, la dette publique par rapport au PIB a diminué, à cinq reprises, en France : 1970-1972, 1976-1977, 1995-2001, 2005- 2007 et 2016-2019. Ces reculs ont été obtenus par la réalisation d’excédents budgétaires primaires (les 3 premiers épisodes), grâce la croissance (les 4 premiers épisodes) et grâce à la baisse des taux d’intérêt (2016-2019). À la différence de l’Allemagne ou des États-Unis, les diminutions sont, en France, de faible ampleur et de courte durée.

L’Italie a de son côté enregistré trois périodes de recul de sa dette publique en 1979, de 1993 à 2007, et de 2013 à 2019. Ces diminutions sont associées à des excédents budgétaires primaires (les 2 derniers épisodes), à la croissance (1979) et aux taux d’intérêt bas (les 2 derniers épisodes).

Economies budgétaires plutôt que hausses d’impôts

Les expériences passées de réduction des dettes publiques par rapport au PIB soulignent l’importance de la croissance et des politiques budgétaires restrictives. La diminution de la dette est plus forte et plus longue dans le temps pour les États qui ont réalisé des économies budgétaires. Les États optant essentiellement pour les hausses d’impôts enregistrent des reculs de leurs dettes plus limités et plus éphémères, ce qui est le cas de la France.

Améliorer le taux de croissance, réduire les dépenses publiques

La baisse des taux a été un facteur non négligeable de la diminution des dettes publiques. À la lecture des exemples passés, les gouvernements doivent donc agir pour améliorer le taux de croissance potentielle et pour réduire leurs dépenses publiques. La croissance potentielle est actuellement au sein de l’OCDE, handicapée par la stagnation de la population active, par l’accroissement des prélèvements et par les faibles gains de productivité.

Au niveau budgétaire, les États doivent faire face à des demandes croissantes. La santé, la retraite, la dépendance, la transition énergétique, le soutien au pouvoir d’achat en période d’inflation constituent des sources importantes d’augmentation des dépenses publiques.

Auteur/Autrice

  • Philippe Crevel est un spécialiste des questions macroéconomiques. Fondateur de la société d’études et de stratégies économiques, Lorello Ecodata, il dirige, par ailleurs, le Cercle de l’Epargne qui est un centre d’études et d’information consacré à l’épargne et à la retraite en plus d'être notre spécialiste économie.

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