Israël : les expatriés inquiets mais solidaires

Israël : les expatriés inquiets mais solidaires

Depuis quelques jours le monde entier assiste à un emballement du conflit entre Israël et les Palestiniens. Un affrontement, par roquettes et Dôme de fer interposés, qui a déjà causé des morts, trop de morts des deux côtés.

Un embrasement dont les causes sont nombreuses et complexes. Nous vous proposons de revenir sur les origines de ce conflit et les conséquences pour les Israéliens et les Français installés dans l’Etat hébreu.

Une situation politique complexe

En Israël

Les Israéliens ont été appelés aux urnes déjà quatre fois et aucune majorité viable n’en est sortie. Le Premier Ministre Israélien Benyamin Netanyahou a demandé au parti arabe islamiste de Mansour Abbas de se joindre à une coalition. Ayant refusé cette offre, Abbas a détruit les ambitions de Netanyahou. Le Président de l’État d’Israël a alors demandé à Yaïr Lapid de former un gouvernement. Pour ce faire ce dernier a besoin des voix du parti de Mansour Abbas.

L’embrasement de la situation fait le jeu de Netanyahou car si Lapid refuse de s’allier avec le parti islamiste d’Abbas, les Israéliens seront dans l’obligation d’aller vers de nouvelles élections et Netanyahou aura alors la possibilité de se représenter. Le Gouvernement actuel en Israël est un gouvernement d’intérim avec à sa tête deux chefs de parti (Netanyahou et Gantz) qui se détestent.

Dans les territoires autonomes de Cisjordanie

De l’autre côté, la situation politique est aussi complexe et fragile. Mahmoud Abbas, Président de l’Autorité palestinienne a reporté l’élection législative du 22 mai et l’élection présidentielle de juillet 2021. L’excuse donnée par Abbas est que « Le scrutin est reporté jusqu’à ce que notre peuple puisse exercer ses droits démocratiques à Jérusalem. » Ceci est un prétexte car Abbas savait qu’Israël n’autoriserait jamais le vote à Jérusalem, comme il ne l’avait pas autorisé en 2006.

La vraie raison est que le parti de M. Abbas a peur de perdre les élections et a trouvé un prétexte pour les reporter.

Les Palestiniens moins soutenus par les Arabes

Depuis les accords d’Abraham, le problème palestinien n’est plus au coeur de la diplomatie des pays arabes. Avant ce traité, le monde pensait que le conflit israélo-arabe ne pouvait se résoudre sans un accord avec les Palestiniens. Ces derniers se sont sentis trahis par les états arabes signataires de cet accord. Le Bahrein a signé lui aussi un traité de paix, laissant la porte ouverte pour que l’Arabie saoudite, gardienne des lieux saints musulmans, reconnaisse à son tour Israël et signe un traité de paix.

Ainsi, suite aux accords d’Abraham et à la crise de la Covid, les revendications palestiniennes sont mises aux oubliettes tant par les occidentaux que par les pays anciennement frères.

Jerusalem, la ville des discordes

Les origines de l’embrasement de ces derniers jours est, comme souvent, à chercher du côté de Jerusalem, la ville dont les deux parties souhaitent y établir leur capitale.

Avant la création de l’État hébreu en 1948, le quartier Sheikh Jarrah était principalement habité par des familles juives. A la fin de la guerre de 1948, le quartier est passé sous contrôle de la Transjordanie et les habitants juifs en ont été expulsés. Une longue bataille juridique s’est alors engagée pour savoir à qui appartenait les maisons de Sheikh Jarrah. Les autorités judiciaires ont statué en 1973 que ces biens appartenaient à des familles juives. Depuis, certaines familles arabes contestent ce jugement et la Cour Suprême Israélienne doit rendre une décision dans les jours qui viennent.

C’est ce vieux serpent de mer qui, aujourd’hui, a débordé des tribunaux pour atteindre l’Esplanade des Mosquées.

Incendie sur l’esplanade des mosquées du 10 mai 2021

Les émeutes ont, en effet, commencé ce lundi 10 mai sur l’esplanade des mosquées à Jérusalem. La très grande majorité des Musulmans venus prier ont quitté les lieux en toute quiétude et seuls quelques extrémistes, que l’on peut qualifier de casseurs, sont restés pour en découdre avec les forces israéliennes.

On est en droit de se demander pourquoi les autorités qui gèrent la Mosquée ont laissé ces casseurs accumuler des amas de pierres au sein de cette dernière. Il est bon de rappeler que la gestion de l’ensemble de l’Esplanade des Mosquées est confiée à un waqf, fondation religieuse islamique, dont la Jordanie est garante depuis les accords de Wadi Arabia (1994) qui procurent à la Jordanie le rôle privilégié de garante de l’Esplanade des Mosquées.

Et les Français expatriés ?

La France entend « rester à l’initiative » dans la recherche d’une solution politique, a déclaré Jean-Baptiste Lemoyne, le Secrétaire d’Etat aux Français établis hors de France à I24, la chaine d’info israélienne francophone.

Une position qu’ont du mal à la comprendre les 160 000 français installés dans l’Etat hébreux. Le député des Français de cette circonscription, Meyer Habib, partage la déception de nos compatriotes sur place. Dans un post sur Facebook, il ne cache pas son mécontentement.

Meyer Habib
Meyer Habib

« Je rentre d’Israël où plus de la moitié des 160 000 Français que je représente à l’Assemblée nationale sont sous les bombes, je tiens à le rappeler !Le Hamas et le Djihad islamique, mouvements terroristes, frappent de manière indéterminée, aléatoire, avec pour seul objectif de tuer le maximum de civils : vieillards, femmes, enfants etc. Lorsqu’une démocratie est agressée par des terroristes, aucune équidistance n’est possible ! Je regrette que nous Français ayons choisi de tenir un discours mou, neutre, renvoyant dos à dos agresseurs et agressés, démocratie et mouvement terroriste !« 

Meyer Habib, Député des Français installés dans les pays de l’est du bassin méditerranéen

Une solidarité avec les forces israéliennes

Car la grande majorité des expatriés sur place sont pleinement solidaires du gouvernement israélien et de son armée.

Publication sur le groupe « Coups de pousse francophones en Israël »

Cette crise renforce aussi le lien entre les membres de la communauté française et même francophone. En première ligne, les acteurs de la Sécurité et de la Santé multiplient leurs publications sur les réseaux sociaux. Ils détaillent les actions qu’ils mettent en place pour rassurer au quotidien et secourir la population en cas de besoin.

Publication sur Facebook

Une importation du conflit en France ?

En plus de la situation sur place, les expatriés s’inquiètent d’une possible importation du conflit en France et attaquent vigoureusement ceux qui ne partagent pas leur avis.

Publication sur un groupe d’expatriés français en Israël

La communauté sur place salue d’ailleurs la décision du ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin d’interdire les manifestations de soutien à Gaza en France.

Un retour des expatriés en France ?

Cependant d’autres Français installés plus récemment sur place comme le basketteur Arthur Rozenfeld, qui a rejoint l’équipe d’Ashdod en 2020, s’interrogent sur le maintien de leur présence au sein de l’Etat hébreu.

« Moi, c’est impossible que je vive ça. S’il n’y a pas un minimum de sécurité, parce que ça peut frapper à n’importe quel endroit, je ne peux pas jouer dans de bonnes conditions. Surtout avec l’importance des matchs. » 

Arthur Rozenfeld, basketteur français à Ashdod

Les prochaines semaines seront décisives pour les Français d’Israël mais aussi pour toute la région, déjà secouée par les crises en Turquie et les tensions permanentes avec l’Iran.

Auteur/Autrice

  • Samir Kahred a suivi ses parents dont le père était ingénieur dans une succursale du groupe Bouygues. Après une scolarité au Lycée français et des études au Caire, il devient journaliste pour des médias locaux et correspond pour lesfrancais.press

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1 Comments

  1. Il n’y a aucune équivalence entre une campagne de terreur asymétrique menée par une puissance nucléaire contre un peuple qui n’a ni État, ni armée, ni force aérienne, ni marine, et une infrastructure civile presque inexistante.

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