Les leçons de Monsieur Charlie Watts

Les leçons de Monsieur  Charlie Watts

Charlie  Watts,  le  batteur  des  Rolling  Stones  depuis  1963,  nous  a malheureusement quittés  le  24  août  dernier.  Il  en  a  été,  pendant  plus  de  57  ans,  le  métronome.  Par  son tempo,  il  fixait  le  rythme  aux  autres membres  du  groupe,  Mick  Jagger,  Keith  Richards, Ronnie  Woods  et Darryl  Jones  remplaçant,  depuis  1994,  Bill  Wyman.  Même  s’il  était conscient  de  son  rôle  incontournable,  il  souhaitait  rester  derrière,  dans  l’ombre  ou presque.  Durant  la  présentation  des  membres  du  groupe  lors  des  concerts,  Mick  Jagger aimait  à  souligner  que  Charlie  Watts  savait parler.  À  cette  occasion,  le  public l’applaudissait  durant  de  longues  minutes  rendant  ainsi  hommage  à  son  apport  musical. Sa  discrétion  ne l’empêchait  pas  d’être  fier  de  son  travail.

Régulateur des tensions internes  

Au  sein  des  Stones,  il  n’était pas  que  le  batteur ;  il  remplissait  un  grand  nombre  de  fonctions  comme  la  supervision artistique  de  la  réalisation  des  scènes  de  concert  ou  des  vêtements  portant  le  célèbre logo.  Il  épaulait  également  Mick  Jagger  dans  le  suivi  de  la  gestion  financière  des différentes  activités  du  groupe.  Il  était  surtout  le  régulateur  des  tensions  internes  en  étant capable  de  gérer  les  caractères tranchés  des  deux  patrons  que  sont  Mick  Jagger  et  Keith Richards.  Son  humilité  était  l’un  de  ses  atouts  maître.  La  force  de  Charlie  Watts  était également  de  mettre  son  talent  et  son  intelligence  au  service  du collectif.   

Cette  règle  vaut  pour  la  musique  mais  évidemment  pour  toutes  les activités  humaines  et l’économie  en  particulier.  Le  dernier  championnat  d’Europe  de  football,  cet  été,  a  prouvé que  les  talents  individuels  ne  faisaient  pas  une  équipe.  Depuis  une  vingtaine  d’années, les  pays  animés par un esprit  collectif  comme la  Corée  du Sud  ou  l’Allemagne s’en sortent mieux  sur  le  plan  de  l’emploi  et  de  la  croissance  que  les  pays  divisés.

Complémentarité, spécialisation, esprit de groupe  

Il  en  est  de  même pour  la  gestion  de  l’épidémie.  La  campagne  de  vaccination  a  été  rendue  possible  par  la mobilisation  coordonnée  de  tous  les  acteurs,  ministère  de  la  Santé,  Agence  régionale  de santé, collectivités  locales,  pompiers,  médecins  de  villes,  infirmiers,  etc.   La complémentarité,  la  spécialisation  et  la  fidélité  à  l’esprit  du  groupe  sont  les  autres leçons  à  retenir  de  Charlie  Watts.  

Par  ses  qualités,  son  caractère,  il  était  complémentaire des  autres membres  des  Stones.  Il  s’est  spécialisé  dans  les  domaines  où  il  disposait  d’un avantage  comparatif.  Une  entreprise  comme  toute association  humaine  repose  sur  cette complémentarité,  sur  cette  spécialisation  de  ses  salariés  et  sur  le  partage  de  certaines valeurs.

L’attachement  de  Charlie  Watts  au  jazz  et  au  blues  animait  son  jeu  de  batterie et  irradiait  la  musique  des  Stones.  Par  ses  études  d’art,  il  avait une  culture  différente  de celle  de  Mick  Jagger,  ancien  élève  de  la  London  School  of  Economics  ou  de  Keith Richards,  féru  de  guitare.  Comme  les  autres  membres  du  groupe,  Charlie  Watts  était  un infatigable  travailleur.  Le  façonnage  des  morceaux  pouvait  s’étaler  sur  des  années. Des morceaux  jugés    secondaires  pouvaient  trouver  une  nouvelle  chance  cinq  ou  dix  ans  plus tard  à  force  d’être  revus.  Charlie  Watts  savait  accompagner  l’esprit  imaginatif  des  deux leaders  en  ayant  à  l’esprit  qu’un  beau  morceau  de  musique  doit  groover,  faire  danser.    

Si la  maladie  ne  l’avait  pas  atteint,  il  était  censé  reprendre  des  séances  d’enregistrement  au mois  de  juin  et  des  répétitions  au  mois  de  septembre.  Malgré  son  âge  avancé,  il  aimait  à répéter  qu’après  quinze  jours  de  repos,  ses  baguettes  lui  manquaient  tout  comme  ses compères. 

Que  l’état  d’esprit  de  ce  batteur  d’exception  qui  a  appris  la  musique  en l’écoutant  puisse  guider  les  pas  de  tous  les  acteurs  de  l’économie  en  cette  rentrée  2021.   

Auteur/Autrice

  • Philippe Crevel est un spécialiste des questions macroéconomiques. Fondateur de la société d’études et de stratégies économiques, Lorello Ecodata, il dirige, par ailleurs, le Cercle de l’Epargne qui est un centre d’études et d’information consacré à l’épargne et à la retraite en plus d'être notre spécialiste économie.

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