Les Russes regardent Israël frapper l’Iran

Les raids de l’aviation israélienne s’intensifient. En une semaine, ils ont détruit quatre cibles d’importance en Syrie. La première est une base au sud de Damas, proche du Golan, à 80 km de la frontière israélienne, à Salkad. Etaient visés un entrepôt de missiles sol-sol iranien et un radar qui guidait les batteries antiaériennes fournies par les Russes et qui pouvaient gêner les opérations aériennes. La deuxième est bien plus éloignée, près de Deïr ez-zor, ville placée sur « l’autoroute chiite » entre Téhéran et le Liban, passant par l’Irak et la Syrie, il s’agit d’une base utilisée par les Pasdarans iraniens, le Hezbollah et d’autres milices chiites irakiennes. La troisième est un entrepôt de munitions à la frontière irakienne, à Boukamal.

Raid contre les gardiens de la révolution

Le raid le plus important a visé les forces gouvernementales syriennes, les Gardiens de la révolution iraniens et les miliciens du Hezbollah près de la grande ville de Ham, plus exactement à Salamyeh. Il y a là des aéroports et des usines d’engrais chimiques, soupçonnés de ne pas fabriquer que des engrais, des bases militaires, avec un entrepôt souterrain contenant des missiles iraniens.

Malgré les menaces, ni le Hezbollah ni l’Iran n’ont été capables de répliquer d’une façon ou d’une autre depuis qu’Israël a déclenché son offensive il y a quelques mois. Sans cesse les Iraniens envoient des armes, notamment au Hezbollah, sans cesse elles sont détruites. Sur place, ni les Palestiniens, encore moins les Pays arabes ne soutiennent l’alliance chiite. Les pays de la Ligue arabe ont appelé Israël à renoncer aux annexions, ont soutenu l’Egypte en Lybie, mais n’ont rien dit sur la guerre en cours, parce que leur ennemi commun est l’Iran.

Une annexion sous bienveillance américaine

Le gouvernement israélien a fait savoir qu’il dévoilerait son plan d’annexion, dans la droite ligne du plan américain, la semaine prochaine.

La nomination de Benny Gantz au ministère de la défense nationale n’a en rien changé l’option stratégique définie par le chef d’Etat major Aviv Kokhavi. C’est dire qu’elle était commune avant la formation du nouveau gouvernement et qu’elle explique cette alliance surprenante entre Gantz et Netanyahou.

Le raid israélien près de Hama est passé sous les yeux du quartier général russe à Khmeimim. Les batteries de missiles, uniquement dans les mains des Russes (depuis que celles mises entre les mains des soldats syriens ont détruit un avion russe) sont restés inactives, comme d’habitude. L’accord passé entre Netanyahou et Poutine prévoit que les Israéliens avertissent les Russes de leurs raids quelques temps avant et que ceux ne réagissent.

Les Russes sont dans une situation compliquée. Ils sont alliés, en partie, aux Turcs.  Mais ils sont leurs adversaires à Idlib en Syrie, où ils ont gelé la situation, et désormais en Lybie. L’alliance rêvée, qui consiste à soustraire la Turquie à l’influence américaine, est semée d’embûches.

L’alliance avec les Iraniens les gêne aussi. Elle ne les sert, comme d’habitude, que contre les Etats-Unis. Mais les Russes ont aussi peu confiance en les Iraniens que les Iraniens en eux. Les Russes n’ont aucune sympathie pour les Ayatollahs, et combattent l’islamisme radical. Ce qui explique, en partie, leur soutien à Assad. Quant à ce dernier, il n’est pas toujours un allié docile. Les Russes ont gagné une place en Syrie (qu’ils avaient depuis longtemps) mais que vaut cette place ? Pas de quoi se frotter à l’aviation israélienne. Leur position n’a d’intérêt que pour le marchandage qu’ils peuvent faire avec les Américains et les Européens.

Le retour à la table de discussion avec les Saoudiens, grâce aux Etats-Uunis, un apaisement avec l’Union européenne en Ukraine, un soutien en Lybie, vaut mieux que la défense d’alliés incertains en Syrie. D’autant que la Russie n’a aucun intérêt à un renforcement de l’Iran au Liban et en Méditerranée.

C’est peut être le moment de tenter de discuter entre Européens, si l’on veut considérer les  Russes comme des Européens.

Comme les Israéliens auront annoncé d’ici là leurs projets d’annexion, Emmanuel Macron pourra expliquer en quoi une annexion est une violation du droit international. Comme en Crimée.

Auteur/Autrice

  • Alain Stéphane a posé ses valises en Allemagne à la suite d'un coup de foudre. Aujourd'hui, il travaille comme rédacteur dans un journal local en Saxe et est correspond du site Lesfrancais.press

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