Que se passe-t-il avec le commerce mondial ? 

Que se passe-t-il avec le commerce mondial ? 

La guerre commerciale entre la Chine et les États-Unis est plus sourde qu’aux temps de Donald Trump mais elle persiste sur fond de droits de douane et de mesures non tarifaires. L’Union européenne estime que les États-Unis avec l’Inflation Reduction Act (IRA) mènent une politique industrielle contraire aux intérêts de ses membres. Elle autorise de ce fait les subventions à l’installation d’usines sur leur sol, au risque que cette bataille des implantations se retourne contre certains États membres qui n’auront pas les moyens de financer les aides.

Le commerce international mis à mal par la multiplication des crises géopolitiques

L’Organisation Mondiale du Commerce est affaiblie depuis le désengagement américain décidé par Donald Trump. Le Commerce international est mis à mal par la multiplication des crises géopolitiques. La guerre en Ukraine a abouti à réduire les échanges entre la Russie et les pays de l’OCDE. Elle entrave également les exportations de l’Ukraine, un des principaux exportateurs céréaliers, causant des ravages dans l’approvisionnement et le transport des céréales. 

Taïwan qui produit près des deux tiers des semi-conducteurs mondiaux est sous la menace permanente d’un conflit avec la Chine. L’Inde a imposé ses propres interdictions d’importation. Les échanges mondiaux d’énergie sont toujours sous le risque d’une déflagration au Proche-Orient. 

Les prédictions sur la mort du commerce se sont multipliées. L’essor de l’intelligence artificielle ne s’accompagne pas d’une compréhension accrue entre les peuples. Les utilisations militaires potentielles de cette nouvelle technologie induisent des mesures de protection de la part des États qui la maîtrisent.

commerce mondial
©Stockadobe

Bataille pour les métaux rares et les nouvelles énergies

La bataille concernant l’approvisionnement des métaux rares, indispensables pour l’informatique et les nouvelles énergies renouvelables, contribue à accroître les tensions entre les États producteurs et consommateurs. En 2023, l’Indonésie a interdit l’exportation de bauxite, nécessaire à la fabrication de l’aluminium, après une interdiction similaire en 2020 sur le nickel, un composant crucial des batteries vertes. 

La Chine entend privilégier son industrie en augmentant le prix de vente des métaux rares destinés à l’exportation. Les pays occidentaux, pour limiter l’influence de cette dernière, tentent de l’exclure des chaînes de valeurs. La Chine répond en cherchant des alliés parmi les États émergents et en développement afin, le cas échéant, de bâtir un nouveau système commercial parallèle. 

Pour contrecarrer les sanctions occidentales, les entreprises chinoises recourent, par ailleurs, à des pays comme le Vietnam ou le Cambodge pour exporter ses produits en Occident. 

Les États-Unis, en contradiction avec les règles de l’OMC, conditionnent le montant des droits de douane à des accords de libre-échange. En ce qui concerne les technologies vertes, les États doivent passer sous les fourches caudines du Ministère du Commerce pour pouvoir exporter aux États-Unis avec des droits de douane réduits. En juin, les décideurs politiques de Washington ont exclu les minéraux verts du régime tarifaire de l’IRA, réservant le dispositif aux pays exportateurs ayant conclu un accord de libre-échange avec l’Amérique. 

Un plus grand nombre de pays en développement pourraient commencer à négocier des accords similaires. Si le ralentissement économique de la Chine continue de freiner sa demande de matières premières vertes, l’Occident pourrait bénéficier de la baisse des prix mondiaux (même si les producteurs pauvres comme le Turkménistan et la Zambie, qui dépendent fortement de leurs exportations vers la Chine, pourraient en souffrir). 

L’air du temps est au protectionnisme

Le nombre de mesures prises depuis 2017 est en forte augmentation. Les mesures protectionnistes s’amplifient mais l’Europe et les États-Unis n’en continuent pas moins d’importer des biens électroménagers, des biens informatiques et des véhicules électriques à la Chine. Des années seront nécessaires avant que les pays de l’OCDE puissent produire en masse des éoliennes, des panneaux solaires, des batteries et des véhicules électriques. 

Avec une demande interne en fort ralentissement, la part du commerce extérieur au sein du PIB chinois s’est accrue en 2023. L’Empire du Milieu, loin des discours nationalistes de ses dirigeants, dépend des exportations réalisées à l’Ouest. La démondialisation n’est pas encore d’actualité. En incluant les biens intermédiaires, les importations chinoises, par rapport au PIB des États-Unis, sont, en 2023, équivalentes à leur niveau de leurs cinq dernières années. La réorientation du commerce extérieur de la Chine au profit de la Russie reste avant tout politique. Ce dernier pays arrive bien loin derrière les États-Unis ou la zone euro au niveau des ventes. La Chine a besoin des États-Unis et de l’Europe pour maintenir un minimum de croissance et ces derniers ont besoin de la Chine pour de nombreux biens.

Auteur/Autrice

  • Philippe Crevel est un spécialiste des questions macroéconomiques. Fondateur de la société d’études et de stratégies économiques, Lorello Ecodata, il dirige, par ailleurs, le Cercle de l’Epargne qui est un centre d’études et d’information consacré à l’épargne et à la retraite en plus d'être notre spécialiste économie.

    Voir toutes les publications
Laisser un commentaire

Laisser un commentaire